mercredi 3 mars 2010
SIMENON et PARIS - ~~
Pour mesurer la réalité du mythe du commissaire Jules Maigret, j’avais autrefois –et c’était sur France Inter- imaginé une émission conçue autour du héros de Georges Simenon. Je désirais vérifier les effets de l’imaginaire dont la puissance métamorphose parfois la fiction en réalité. L’expérience fut plus que convaincante. Au micro, les dizaines de personnes interrogées dans la rue, dans un bar, dans un restaurant, autour du Quai des Orfèvres, chez le marchand de pipes et de chapeaux, avaient toutes affirmé, de bonne foi, qu’elles avaient croisées, au moins une fois, le commissaire Maigret, dans Paris. Mieux : quelques restaurateurs ou cafetiers m’avaient confié, avec la même assise, que leurs parents (qui étaient de la génération de Maigret) l’avaient bien connu. Le bistrotier désignait du doigt la table où il s’installait chaque soir pour boire son apéro ou sa bière. Le chef de cuisine me jurait que Maigret venait régulièrement dans son établissement pour y déguster son fameux bœuf bourguignon, la marchande de chapeaux se souvenait que le commissaire, « un homme si gentil » tentait de séduire sa mère à chaque fois qu’elle lui posait un feutre sur la tête. Quant au fabricant de pipes de l’avenue de Clichy, à l’en croire, c’était lui seul qui avait taillé les dizaines de bouffardes de Maigret. Je vous rapporte cette histoire pour dire que Georges Simenon et son commissaire Maigret bien que le premier soit né à Liège et l’autre dans l’Allier ont imprégné l’esprit du public et se sont installés, à jamais, dans les rues et les lieux de Paris. D’ailleurs, Simenon a habité, très jeune, la capitale. C’était en 1922. Il avait dix neuf ans et avait déjà écrit deux, peut-être même, trois romans. Le succès est venu vite ; il lui a permis d’occuper, très longtemps, le deuxième étage de l’immeuble du maréchal de Richelieu situé au 21 place des Vosges. C'est-à-dire que Simenon est devenu le voisin de Colette. Colette qui, attentive à ce jeune auteur, lui a recommandé « d’écrire simple ». Plus tard, Simenon dira « j’ai essayé d’être le plus simple possible. C’est le conseil qui m’a le plus servi dans ma vie. Je dois une fière chandelle à Colette de me l’avoir donné ». Mais avant de finir dans l’un des étages noble du 21 place des Vosges, Simenon a occupé son rez-de-chaussée : une petite pièce sombre. Il y aurait rédigé une importante partie de son œuvre. Après avoir dîné à La Coupole, au Bœuf sur le toit ou au Jockey il rentrait chez lui et dormait trois ou quatre heures avant de s’installer à sa table de travail où l’attendaient une bouteille de vin et la machine à écrire en… location. Il rédigeait jusqu’à 80 feuillets par nuit. Notons que Simenon a, entre 1924 et 1931, publié 190 romans sous l7 pseudonymes différents. C’est dire sa puissance de travail ! Quant à Maigret, Jules Maigret, il est apparu pour la première fois en 1929. C’était dans « Pietr-le-Letton ». Plus qu’une simple édition cet ouvrage est un événement puisqu’il donna l’occasion au père de Maigret de signer, pour la première fois, un roman sous l’identité de Georges Simenon.
Paris, disait-il, est « mon port d’attache ». Et même s’il a fait de lointains voyages, qu’il a séjourné aux Etats-Unis, qu’il s’est rendu spécialement aux Iles Samoas pour se recueillir sur la tombe de Robert-Louis Stevenson, que la guerre l’a conduit à La Rochelle (un épisode de sa vie qui reste controversé), Georges Simenon est toujours revenu à Paris. A son retour de voyages il a loué une chambre à l’hôtel Claridge en attendant de pouvoir occuper de nouveau l’appartement de la Place des Vosges. C’était en 1945. Douze ans plus tard, c'est-à-dire en 1957 il quitte Paris et se retire définitivement en Suisse ; à Figuiers exactement, dans une demeure baptisée « La maison rose ». En 1981 il y fait faire des travaux et il est obligé de loger, en hôtel, à Lausanne. C’est dans l’une des chambres de ce quatre étoiles qu’il a pris la main de Teresa, sa compagne et fidèle amie et lui a dit : « enfin, je vais dormir ». C’était le 4 septembre 1981. Il était 3 h 30’ le matin.
Eric Yung.
Paris, disait-il, est « mon port d’attache ». Et même s’il a fait de lointains voyages, qu’il a séjourné aux Etats-Unis, qu’il s’est rendu spécialement aux Iles Samoas pour se recueillir sur la tombe de Robert-Louis Stevenson, que la guerre l’a conduit à La Rochelle (un épisode de sa vie qui reste controversé), Georges Simenon est toujours revenu à Paris. A son retour de voyages il a loué une chambre à l’hôtel Claridge en attendant de pouvoir occuper de nouveau l’appartement de la Place des Vosges. C’était en 1945. Douze ans plus tard, c'est-à-dire en 1957 il quitte Paris et se retire définitivement en Suisse ; à Figuiers exactement, dans une demeure baptisée « La maison rose ». En 1981 il y fait faire des travaux et il est obligé de loger, en hôtel, à Lausanne. C’est dans l’une des chambres de ce quatre étoiles qu’il a pris la main de Teresa, sa compagne et fidèle amie et lui a dit : « enfin, je vais dormir ». C’était le 4 septembre 1981. Il était 3 h 30’ le matin.
Eric Yung.
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