jeudi 6 janvier 2011

RIMBAUD, le poète qui n'a jamais su sa célébrité.

RIMBAUD, LE POETE QUI N'A JAMAIS SU SA CELEBRITE. 




La poésie dit-on aurait perdu de son aura. Est-ce certain ? Il est difficile de le croire tant de très nombreux clubs de poésie oeuvrent, partout en France, en faveur de la muse Calliope. Quant aux dilettantes de la rime ils sont légions ! Qui d’entre nous n’a pas, en effet, une seule fois dans sa jeunesse, tenté l’acrostiche et l’alexandrin? Ne serait-ce qu’à l’occasion d’une fête des mères. Preuve s’il en est que la poésie est en nous. Alors, pourquoi ne pas redécouvrir quelques grands poètes ? Cela pourrait être Baudelaire, Villon, Verlaine ou bien d’autres. Mais, prenons le plus (enfin, peut-être) le plus turbulent d'entre eux : Arthur Rimbaud. Rimbaud qui dès son adolescence a montré une intelligence et une sensibilité si intenses que son professeur de l’époque, un certain Desdouets, principal du collège de Charleville, a écrit sur le cahier de notes du futur poète : « Rien de banal ne germe dans cette tête, ce sera le génie du Mal ou le génie du Bien ». C’était en l871. Arthur Rimbaud avait 17 ans ! Et très tôt, Rimbaud a rêvé de conquérir le monde des lettres. Il aspirait aussi à la reconnaissance et voulait devenir le chef de file des « poètes-voyants » c'est-à-dire appartenir à ceux qui ont - comme l’a écrit Gérard de Nerval - le « pouvoir de franchir ce seuil qui sépare la vie réelle d’une autre vie » ; un pouvoir que tous les plus grands poètes ont revendiqué mais que Rimbaud a affirmé clairement lorsqu’il a souhaité rejoindre le camp des parnassiens. Oui, parce que cet enfant de Charleville Mézières a tenté l’aventure parisienne. Il est venu la première fois en l870. Mais au lieu de se retrouver dans le cercle des écrivains et des poètes, il a été jeté en prison. Il n’avait pas payé son ticket de train ! Fort de cette mauvaise expérience, lorsqu’il a de nouveau décidé de conquérir la capitale, il y est revenu… à pieds. Rimbaud a flirté avec la Commune, est devenu l’amant de Verlaine et a habité chez lui, au grand dam de son épouse. Il a occupé successivement les appartements de Théodore de Banville, de Charles Cros et d’André Gill, des lieux parisiens que l’on peut visiter. Mais Rimbaud s'est révolté contre ses amis et a raillé  leur art. C’est l’époque où il publie « L’orgie parisienne » et « Les pauvres à l’église ». Un peu plus tard et après l’épisode de ses amours tumultueuses avec Verlaine qui a tiré , sur lui, deux coups de révolver ) il a écrit « Une saison en enfer ». Pour Rimbaud c’est fini. Il a renoncé à la célébrité. Est venu le temps de l’errance et de la longue halte à Harar, en Abyssinie, où il devient commerçant. Rimbaud a oublié Paris et a mis Verlaine dans l’armoire de l’oubli. Mais ce qu’ignore Rimbaud c’est que Paul Verlaine, justement, a pris l’initiative de faire publier beaucoup de ses poèmes réunis sous le titre « Les illuminations ». Et dans toute la France Rimbaud est devenu célèbre. Mais il ne le saura pas. Enfin, il l’apprendra mais ce sera quelques semaines avant sa mort. Il avait 37 ans et c’était le 10 novembre 1891.
Pour terminer cette courte chronique écoutons la musique des mots d’Arthur Rimbaud, les vers d'un de ses plus célèbres poëmes :  
C'est un trou de verdure où chante une rivière,
Accrochant follement aux herbes des haillons
D'argent ; où le soleil, de la montagne fière,
Luit : c'est un petit val qui mousse de rayons.
Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort ; il est étendu dans l'herbe, sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.
Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme
Sourirait un enfant malade, il fait un somme :
Nature, berce-le chaudement : il a froid.
Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine,
Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.


(Le dormeur du Val ).


Eric YUNG.



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